« Tous les hommes étaient des nazis »

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Slogan révolutionnaire juif du yiddishland

 

Devenu slogan pour des activistes véganEs, cette phrase « Tous les hommes étaient des nazis« , employée par un écrivain juif né à Varsovie en 1904 est pour beaucoup l’illustration du fait que l’exploitation animale est similaire à celle vécue par les populations victime du nazisme.

On la trouve sur des banderoles, des affiches et récemment en bandeau publicitaire sur le livre « Un éternel Treblinka » de Charles Patterson.

Nous avons souhaité revenir sur le contexte de cette phrase afin de rendre à son auteur, Isaac Bashevis Singer, la légitimé de ses propos et éviter les amalgames douteux que l’on retrouve fréquemment.

 

Isaa Bashevis Singer, la culture yiddish et le nazisme

Isaac Bashevis Singer est né à Varsovie, il a passé la majeur partie de sa vie aux états-unis et a été reconnu officiellement pour son œuvre en 1978 en étant prix Nobel de littérature.

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Issac B Singer écrit en Yiddish, le yiddish est cette langue utilisée par les populations juives des pays de l’Est et qui constituaient un territoire sans état : le Yiddishland. Les ouvrages d’Issac B Singer sont des témoignages du mode de vie et de la culture des juifs yiddishophones. Ce sont des témoignages essentiels d’une civilisation anéantie par l’antisémitimse, fascisme et le nazisme. Avec d’autres auteurs comme Sholem Aleikhem, il est un des plus importants auteurs yiddishs.

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Habitant du Shtelt (Yiddishland)

 

« Tous les hommes étaient des nazis »

« Tous les hommes étaient des nazis » est une citation tirée de l’ouvrage « Ennemies, Une histoire d’amour » qui était non pas un ouvrage scientifique mais un roman.

On se situe dans l’après guerre au milieu des survivantEs ; le personnage principal, Herman Broder, a perdu toute sa famille et a été sauvé de l’anéantissement nazi par une paysanne, une goy illettrée, fidèle et amoureuse d’Herman. Dans cet ouvrage, il y a trois femmes qui sont liées à Herman. Elle, cette juste qui a sauvée Herman et deux autres femmes russes juives survivantes des camps nazis.

Ce texte est un récit négatif, comme ceux de l’après l’anéantissement nazi des populations juives et qui est le récit de survivantEs , réfugiéEs aux états-unis. C’est une critique des idéologies fascistes, avant tout du nazisme mais également du communisme autoritaire et stalinien et dans une moindre mesure il montre en quoi le sionisme et l’implantation en Palestine était pour beaucoup un choix par défaut. En effet beaucoup refusaient la migration vers les états-unis, mais aussi de rester en Europe centrale car l’antisémitisme y est encore très présent et de nombreux pogroms y avaient encore lieu.

Le roman est avant tout une réflexion sur la place de Dieu dans l’histoire en lien avec le nazisme. C’est une critique d’une vision positive du monde et de son histoire :

« Les religions mentaient. La philosophie avait fait fiasco sitôt née. Les oiseuses promesses du progrès n’étaient qu’un crachat jeté au visage des martyrs de tous les temps. […] Le progrom de Kichinev n’aura jamais de fin, et dans les fours d’Auschwitz les Juifs brûleront jusqu’à la consommation des siècles. A ceux qui n’ont pas le courage de mettre fin à leur propre existence, une seule issue est offerte : abêtir leur conscience, étouffer leur mémoire, éteindre en eux la dernière lueur d’espérance. »

Herman n’est pas un héro, c’est un pauvre migrant, sous-traitant le travail pour un Rabbin excentrique, un juif américain qui a réussi, bien opposé de notre pauvre migrant. Herman trompe sa femme et son mode, il garde des oiseaux, un jolie petit couple en cage, métaphore de son propre enfermement. Il va être violent avec une de ses compagnes. Ils se délaisse, les délaisse, il se dit mort.

Herman philosophe beaucoup et il débat, de la religion, du sens de l’histoire, de l’intérêt de la vie, de sa culpabilité de survivant et il débat du sort des animaux et de végétarisme :

« –Tu m’avais promis de ne plus préparer de viande.

Je me l’étais promise à moi moi-même, mais sans viande hélas, pas de cuisine. Dieu lui même mange de la viande – la chair des hommes. Les végétariens, tu sais, ça n’existe pas. Si tu avais vu ce que j’ai vu , tu aurais compris que Dieu se plaît aux abattoirs.

On n’est pas obligé de faire tout ce qui plaît à Dieu.

Mais, mais si. »

« Herman comparait le zoo à un camp de concentration. »

« Depuis quelques temps déjà, il projetait de devenir végétarien. Chaque fois que l’occasion s’en présentait, il répétait à qui voulait l’entendre ce que les nazis avaient fait aux Juifs, l’homme le faisait à l’animal. »

Tout d’abord ce livre est un témoignage, un témoignage des survivantEs juifs/juives de l’anéantissment de leur culture par le régime nazi. Ce témoignage est communautaire dans son sens le plus positif, il se place comme extérieur au monde des « Gentils » traduction de mots goy dans ses deux sens. C’est un témoignage contre l’assimilation et pour le respect de la mémoire des morts. C’est un hommage au livre (religieux) :

« Le front penché sur sa Gemara, Herman en contemplait les lettres, les mots. Ces pages étaient sa patrie, en elles demeuraient ses parents, ses grands-parents, tous ses ancêtres. »

Maintenant, il est temps de revenir sur la citation qui se situe à la fin du livre et que l’on retrouve très souvent :

« Chaque fois qu’Herman avait assisté au massacre des animaux et des poissons, il avait toujours eu la même pensée dans leur comportement avec les créatures vivantes, tous les hommes étaient des nazis. »
« La suffisance avec laquelle l’homme disposait des autres espèces comme il lui plaisait était un exemple des théories racistes les plus extrêmes, du principe que la force fait le droit. »

La réflexion dans un roman autour du sort des animaux est un élément essentiel de contribution au savoir-déporté mais c’est aussi un roman témoignage et communautaire. C’est un respect de la parole juive dont les nazis les avaient privé.

Mais après cette citation, il y a aussi une sorte de fatalisme face à l’idéalisme d’Herman qui veut devenir végétarien et redevenir un juif pieux, mais « Herman s’était engagé à devenir végétarien, mais Yadwiga n’avait jamais voulu en entendre parler. Ils avaient assez souffert de la faim, d’abord au village, puis dans le camp. Ils n’avaient pas gagné la riche Amérique pour encore mourir de faim. » A cause de son vécu Yadwiga est devenue nihiliste, dans sa logique Dieu mange le corps des juifs, alors elle continue à manger de la viande.

Il nous faut rappeler que cette phrase est issue d’un roman, un roman qui est écrit par un auteur juif végétarien qui a survécu à la Shoah. Ce roman décrit bien le contexte et les difficultés d’existence des survivants mais n’est pas un témoignage direct. Cette phrase n’a pas le but d’être une vérité universelle ni de se prétendre d’une exacte vérité historique. Elle est issue d’un roman qui se situe entre la fiction et l’autobiographie.

Il nous faut rester vigilitantEs quant à l’utilisation de ce propos pour ne pas le confondre et le faire passer pour ce qu’il n’est pas.

 

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